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Voyage au centre de la mer...

dimanche 9 mai 2010, par marc

L’ombre du Titanic vient hanter l’espace d’un instant la rade de Cherbourg et faire revivre les grandes heures des voyages transalantiques.

Quand on vit au coeur d’un pays de volcans assoupis, les facéties d’un spécimen finlandais ne manquent pas d’attirer l’attention et de susciter chez moi un ricanement jubilatoire ...

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Vomissant et crachant ses torrents de cendres, voilà que le volcan finlandais macule le ciel de ses microscopiques et innombrables peaux de bananes maléfiques, redoutable poil à gratter pour les réacteurs de nos Airbus et Boeings.

Voilà les zincs cloués aux sols semant le désarroi chez les salopards en casquette, les aventuriers de la carte bleue, les chevaucheurs Dizzy Jet et Merdiques Frontières qui se retrouvent gros jean comme devant irrémédiablement plantés dans leur tourisme lyophilisé.

"Maman ah peur ah peur... Mais que fait le gouvernement... Au secours a pu avion, a peur, a peur, je veux rentrer dans ma maison" ...

Et voilà ... Mon cher Jules Verne avait le nez creux en situant le départ de son voyage au centre de la terre dans le cratère du volcan Sneffels de cette même terre d’Islande qui agite tant les chroniques en ce joli moi d’avril...

Pour ma part la visite de la cité de la mer achevée, je me plonge dans la relecture d’un autre chef d’œuvre du grand Jules : "Vingt mille lieux sous les mers".

La fin d’après midi étant fraiche, je me suis installé confortablement dans ma voiture garée au bout du bout du port de Cherbourg, près de la gare maritime, face à la rade.

C’est là que je que je bouquine, bien au chaud, face au spectacle sans cesse renouvelé de l’entrée d’un grand port de commerce. Comble de bonheur j’ai déniché une station de radio, "la radio de la mer" qui distille en sourdine des informations sur le monde maritime.

Et soudain une nouvelle me tire des grandes profondeurs où m’avait entrainé le Nautilus du capitaine Nemo : on annonce l’escale impromptue du "Queen Victoria" paquebot de la légendaire Cunard à Cherbourg ce soir.

Brève escale pour déposer sur le continent des touristes allemands au retour d’un tour du monde et qui préfèrent emprunter un bon autobus pour rallier la Germanie plutôt que de risquer une hypothétique correspondance aérienne au terme de la croisière à Southampton....

Ah fichtre !!! Un prestigieux liner de la Cunard .. ici, accostant le quai de la vénérable gare maritime qui a vu s’amarrer tous les grands transatlantiques de la belle époque ... Voilà qui ne manque pas de me réjouir ... Ah c’est vraiment un bon gars ce tuyau de poêle finlandais !

Levant le nez de mon bouquin je constate avec étonnement que ce bout de quai isolé s’est peu à peu rempli d’une foule de badauds qui semble attendre quelque chose... Pas de doute, ce quelque chose c’est le bateau...

Comment la nouvelle s’est elle répandue ??? Mystère du bouche à oreille et de radio trottoir...

J’abandonne Jules et Némo et sors de ma voiture. Il fait beau, le ciel est pur, étrangement libéré de ses zébrures aéronautiques mais il fait frisquet, l’air est vif...

La foule bat la semelle, oh ce n’est pas une grosse foule mais quand même... Des jeunes, des vieux, des familles qui scrutent l’horizon, la jetée, la rade...

On attend le paquebot... J’ai l’impression de remonter le fil du temps quand l’arrivée d’un transatlantique était marquée par un mouvement de la population vers le port, venue pour approcher le rêve. C’était le temps où le voyage avait encore un sens.

Voyage inaccessible, long, coûteux, voyage sans retour pour certains. Voyage au rythme de la mer de l’incertitude et des tempêtes.

Voyage périlleux certes mais l’iceberg épargne quelques quidams, les femmes et les enfants d’abord, quand le couillon de zinc plonge irrémédiablement au fond de l’océan avec sa cargaison ficelée dans les travées de son cigare d’aluminium.

Et puis le moment magique arrive... Là bas derrière la jetée de la petite rade la haute silhouette du transatlantique se dessine enfin.

Le gros navire embouque la passe, son coup de sirène est comme un cri primal, la foule grogne de plaisir et s’agite. La sirène d’un gros navire s’inscrit dans ces sons et ces bruits qui vous remuent jusqu’au fond de votre être. Le feulement d’un grand fauve dans la nuit africaine a cette même résonance. La sirène du Queen Victoria m’irradie comme le rugissement de ce lion entendu une nuit dans un lodge de Mikoumi en Tanzanie...

Le navire entre majestueusement dans le port et s’immobilise devant la gare maritime qui reprend du service.

Les manœuvres sont appréciées par une foule de connaisseurs... Les passagers accoudés aux bastingages répondent aux saluts des badauds massés sur le quai, une kyrielle d’autobus vient se ranger au pied de la coupée.

Je m’apprête à regagner la ville pour aller dîner mais n’est ce pas la silhouette massive du Général Alacazar que j’entrevois l’espace fugace d’un instant sur le pont supérieur, tout près de la grande cheminée ? Vision fugitive, ce paquebot lui aussi ne serait-il qu’un songe ? Le fantôme de cet autre navire arrivé lui aussi à Cherbourg pour une très brève escale et pour déposer des passagers un soir d’avril 1912 avant de s’élancer pour sa première et dernière funeste traversée ???


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